La charge héroïque du 19e Dragons le 19 août 1914 à Brunstatt
Le 7e corps d’armée, commandé par le général Bonneau est concentré autour de Belfort. Il est renforcé par la 8e division de cavalerie. Des deux côtés de la frontière franco-allemande, les troupes se font face, avec interdiction de franchir la zone tampon. Pourtant, le 2 août à Joncherey, un accrochage entre un poste français et un groupe de reconnaissance allemand coûte la vie au caporal Peugeot et au lieutenant Mayer. Ce sont les premières victimes d’une guerre qui va faire plus de huit millions de morts et vingt millions de blessés.
Le 6 août, le général Bonneau reçoit l’ordre de s’emparer de Mulhouse, de détruire les ouvrages et têtes de pont sur le Rhin et de remonter vers Colmar. Le 7, un violent affrontement près d’Altkirch retarde la marche, le 8 aout au matin, la 14e division se forma en deux colonnes, convergeant sur Mulhouse, la 41e division devant s’avancer à gauche, jusqu’à Lutterbach. Les 41e et 60e régiments d’infanterie restaient à Altkirch.
M. Messimy, Ministre de la Guerre, télégraphiait au général:
« Mon général, l’entrée des troupes françaises à Mulhouse, aux acclamations des Alsaciens, a fait tressaillir d’enthousiasme toute la France. La suite de la campagne nous apportera, j’en ai la ferme conviction, des succès dont la portée militaire dépassera celle de la journée d’aujourd’hui. Mais, au début de la guerre, l’énergique et brillante offensive que vous avez prise en Alsace nous apporte un précieux réconfort. Je suis profondément heureux, au note du Gouvernement, de vous exprimer toute ma gratitude. »
Dès le lendemain, le XIVe corps d’armée allemand, qui s’était délibérément replié, et le XVe corps, arrivent en hâte de la région de Strasbourg et lancent une contre-offensive victorieuse. Le 7e corps d’armée se retire sur Belfort et la défaite vaut au général Bonneau une injuste mutation. 33 généraux sont d’ailleurs relevés de leur commandement pour le seul mois d’août 1914, et plusieurs d’entre eux sont envoyés à Limoges par le général Joffre, d’où l’origine du verbe limoger. Mais Mulhouse reste français.
Le 19 août, la matinée s’annonce radieuse. Les Français prennent la route à 5 heures. « C’est une simple marche militaire par un temps idéal, par un temps enchanteur, à travers des villages fleuris regorgeant de jolies filles. Les colonnes par quatre s’allongent sur des kilomètres et des kilomètres et s’avancent allègrement », se souvient le général Humbert, à l’époque sous-lieutenant au 97e régiment d’infanterie alpine.
Le choc se produira à Dornach, Brunstatt, Flaxlanden et Tagsdorf. La 66e division de réserve avance sur la rive gauche du canal. Les 5e et 6e escadrons du 19e Dragons commandé par le Lieutenant Colonel TOUVET reçu ses ordres : couvrir et éclairer le front, veiller à la protection du flan sud et assurer la liaison avec le 44e Division.
Les Dragons sont accueillis par des coups de fusils aux abords du pont levis de Zillisheim, qui leur causent les premiers blessés. Les deux escadrons reprennent la marche pour traverser le canal plus haut. Le pont de Brunstatt est libre, il est 7 h, les dernières brumes se dissipent les cavaliers traverse Brunstatt sous l’admiration de quelques habitants qui leur signale la présence des allemands aux abords du village. Des éclaireurs se répartissent aux croisements des rues. Trois cavaliers allemands sont aperçus à la sortie du village mais ils ne sont pas inquiété par les quelques coups de fusil des dragons. Un ancien caporal clairon des Zouaves attire l’attention des dragons sur la présence des allemandes a la sortie du village. Deux éclaireurs s’avance dans la rue de Bruebach. Arrivée à la hauteur du cimetière, ils s’arrêtent et discutent à haute voix sous le regard de deux bataillons allemand embusqué de part et d’autre de la chaussée. Les deux cavaliers rebroussent chemin pour rendre compte, en passant devant la première maison, un volet s’ouvre légèrement et indique la position de allemands à 20 m sur leur flan, deux coups de feux retentissent, un cavalier et touché. Soutenu par son camarade ils se replient vers le carrefour. L’alerte est donnée. Les dragons avaient rangé leurs chevaux, ils entament la progression à pied en deux collons longeant les maisons, un officier à cheval commande la manœuvre, quelques coup de feux partent. Les allemands restent invisibles.
Le Lieutenant Colonel TOUVET arrive, informé du danger il décide de forcer la sortie du village. Avec le 6e escadron il s’élance sabre au clair après avoir déclaré : « En avant pour la France » en colonne par quatre. Les cavaliers quelque peu éblouis par le soleil se dirigent vers la sortie du village. A 20 m de leur position les allemands déclenche un violent tir de barrage avec leurs puissantes mitrailleuses. En un instant les dragons sont fauchés à bout portant. Le guet-apens soigneusement monté a raison de 25 cavaliers dont le Lieutenant Colonel TOUVET et le capitaine HAYEN foudroyés à la tète de l’escadron. 20 autres cavaliers sont blésés dont le capitaine de MASOL et le Lieutenant BOYER. Les dragons se replient et l’infanterie allemande occupe le village et l’artillerie française pilonne Brunstatt avec leur 75.